La formation japonaise de Church Of Misery sort son septième album intitulé Born Under Mad Sign. Figure emblématique du doom nippon, le groupe nous prouve une fois de plus qu'il a toujours sa place parmi les grands de ce style musical que j'affectionne particulièrement. Retour sur cet opus qui m'a transcendé dès la première écoute.
Le groupe
Source : Facebook officiel du groupe
Church Of Misery a été fondé à Tokyo en 1995 par le bassiste Tatsu Mikami, après la dissolution de son groupe de thrash metal Salem. Il est le seul membre à être toujours dans le line-up actuel qui a changé de musiciens à plusieurs reprises à travers les années. Malgré ces changements, sa signature musicale est toujours bien présente d'albums en albums pour le plus grand plaisir des fans du groupe. Les départs de nombreux musiciens au sein de la formation sont justifiés comme étant soit des problèmes de santé, soit des raisons personnelles, ou encore, des désaccords au point de vue de la créativité. L'univers musical des japonais est un doom pur et dur influencé par des pointures telles que Black Sabbath et Saint Vitus, , avec des éléments de rock psychédélique. Dans ses nombreuses inspirations musicales, Mikami cite également Blue Öyster Cult, Leaf Hound et November.
Le thème central de leurs compositions, tant au niveau des paroles qu'au niveau de l'inspiration pour l'écriture est l'univers des tueurs en série et des tueries de masse. C'est une tradition, et ce depuis le premier album, Vol.1 sorti en 1997 .
Church Of Misery a tourné énormément au Japon, essentiellement dans la grande région de Tokyo mais a également joué en Europe et aux Etats-Unis. Ils se sont produits dans de nombreaux festivals comme le Roadburn (Pays-Bas), le Motocultor (France) ou encore le DesertFest (Londres et Berlin). Ils ont déjà partagé la scène avec la crème de la crème du doom et du stoner comme Monster Magnet, Saint Vitus, Cathedral, Electric Wizard et Orange Goblin pour ne citer qu'eux. Ils entament une tournée européenne en août prochain avec le groupe de sludge américain Eyehategod. Ils feront d'ailleurs un arrêt par Lessines, dans ma région d'origine en Belgique, le 18 aôut au Centre Culturel René Magritte.
L'album
Pochette de l'album avec le tueur en série allemand Fritz Harmann
Born Under A Mad Sign est le septième album du groupe qui a sorti plusieurs EP et split albums. Il est le succésseur du génial And There There Were None sorti en 2016. L'accueil par le public de ce dernier était unanime quant à la qualité de son contenu. La formartion sur cet enregistrement est la suivante : Tatsu Mikami à la basse, Kazuhiro Asaeda au chant, Toshiaki Umemura à la batterie et Yukito Okazaki à la guitare (membre du groupe Eternal Elysium). Asaeda effectue un retour derrière le microphone car il était déjà présent sur l'album Vol.1. Ce même Vol.1 qui est officiellement le premier disque du groupe, enregistré en 1997, mais qui, à l'époque, était sorti sur le label Doom Records, sans le consentement du groupe. C'est en 2007 que le groupe le republie sur le label japonais Leaf Hound Records.
Cet opus a pris sept mois d'écriture et c'est le plus mature et abouti de la discographie des japonais. La production est subtilement léchée et très efficace. Tous les instruments sont balancés à la perfection et les compositions sont furieusement épiques, ce qui en fait une de mes sorties préférées de l'année.
Cet opus contient sept compositions assez longues, d'une durée de 6 à 10 minutes chaque pour un total de 53 minutes. Il est publié sur le label britannique Rise Above Records, fondé en 1988 par Lee Dorrian, chanteur de Cathedral, qui a fait un bref passage au sein de Napalm Death. Dans son C.V, il a également créé le groupe With The Dead, avec deux ex-membres d'Electric Wizard.
Pour écouter l'album au complet c'est ici que cela se passe :
Le radar analytique et intense d'Eddy
1.Beltway Sniper (John Allen Muhammad) : John Allen Muhammad, surnommé "Le sniper de Washington", ancien vétéran de la Guerre du Golfe, est un tueur en série américain qui a abbatu dix personnes en 2002. Avec l'aide du jeune Lee Boyd Malvo, 17 ans à l'époque, ils commettent treize attaques en l'espace de treize semaines. Il est éxécuté par injection létale le 10 novembre 2009.
L'introduction commence par des bruits d'armes à feu, accompagnés par des enregistrements journalistiques de l'époque. La sensation de terreur commence dès les premières notes. L'influence Sabbath se fait ressentir avec son côté lourd, lent et sombre. C'est groovy, mélodique et libérateur comme composition. J'aime beaucoup la section rythmique (basse/batterie) qui colle parfaitement avec les riffs de guitare d'une agressivité déconcertante et lourd comme les enfers! La voix d'Asaeda est parfaite pour cette ambiance malsaine. Un solo de guitare à 5:50 vient compléter les hostilités avec de la lourdeur jusqu'au moment d'arriver à la composition suivante.
2.Most Evil (Fritz Harmann) : Fritz Harmann, plus connu sous les surnoms "Le boucher de Hanovre" et "Le vampire de Hanovre", était un tueur en série allemand considéré comme l'auteur des meurtres de 27 garçons et jeunes hommes entre 1918 et 1924. Il fut coupable de 24 meurtres et guillotiné. L'affaire fit scandale, d'autant plus qu'il était indicateur de police. Selon la rumeur, il tuait ses victimes en les mordant, au niveau de la pomme d'Adam, souvent pendant les rapports sexuels avec ces jeunes hommes.
Les capacités vocales d'Asaeda sont riches et complexes avec des cris démoniaques de temps à autre, ce qui crée une ambiance particulièrement macabre. La cloche au milieu du morceau renforce ce côté menaçant. A 6:35, nous avons le droit à une accélération du riff qui est suivi d'un solo de guitare aux allures psychédéliques/fuzzy bien trippantes à 7:05. Du grand art.
C'est la plus longue composition de l'album avec pas loin de 10 minutes de pur bonheur!
3.Freeway Madness Boogie (Randy Kraft) : Randy Kraft, connu sous le nom de "tueur de l'autoroute" est un tueur en série américain qui a sévi entre 1971 et 1983 et qui fut condamné pour 16 meurtres d'autostoppeurs et de membres de la communauté gay. Il abandonnait les cadavres au bord de l'autoroute en Californie et en Oregon.
L'introduction est un enregistrement de patrouille de la police lors de l'arrestation de Kraft.
Cette composition très intense a un groove particulier et part dans des contrées de sonorités hallucinantes et hyper prenantes. La ligne de basse est, comme sur beaucoup de morceaux du disque, le fil conducteur de la composition. Mikami est un bassiste complet et talentueux qui apporte sa touche d'une manière charismatique.
4.Murder Castle Blues (H.H Holmes) : H.H Holmes est considéré comme le premier tueur en série américain de l'histoire. Il a avoué lors de son arrestation avoir tué 27 personnes mais 4 ont été prouvées et il y en aurait probablement 9 au total. Il exagérait et mentait sur les meurtres dont il disait en être l'auteur. Il fut pendu en 1896 et il a été déclaré décédé 20 minutes après la pendaison ce qui est plutot long et rare pour ce genre d'éxécution.
L'introduction à la basse nous plonge dans une ambiance desert rock pour ensuite monter en puissance. J'ai trouvé le titre Murder Castle Blues un peu tiré en longueur malgré sa bonne dose de fuzz. Un morceau psyché/doom sympathique mais qui ne marquera pas l'histoire. En tout cas pas pour moi.
5.Spoiler : composition la plus courte qui ressemble à une jam psychédélique. Plus stoner que le reste de l'album, Spoiler est plus accessible que le reste de leur répertoire. A noter la présence de claviers qui nous plonge dans les années 70. Les solos de guitare y sont plus techniques qu'à l'habitude. En concert, c'est surement une pièce que j'aimerais entendre.
6.Come And Get Me Sucker (David Koresh) : David Koresh était le leader de la secte des Davidiens dont 76 membres périssent avec lui dans un suicide collectif dans la région de Wako, au Texas en 1993.
J'y ai trouvé probablement les riffs de guitare les plus travaillés de cet opus.
7.Butcher Baker (Robert Hansen) : Robert Hansen est un tueur en série américain qui a assasiné entre 17 et 21 femmes à Anchorage, en Alaska. Arrété en 1983, il a été condamné à 461 années d'emprisonnement et il meurt en prison à l'âge de 75 ans.
Brutalité mélodique au rendez-vous pour ce dernier morceau.
Les informations inutiles d'Eddy
-Si vous aimez Church Of Misery, je vous suggère d'aller écouter le groupe Sonic Flower, qui est composé d'anciens membres.
-J'ai commandé le vinyle et j'ai hâte de pouvoir l'écouter sous ce format que j'aime particulièrement et qui prend tout son sens une fois installé sur la table tournante, en tout cas pour le mélomane que je suis.
Bref...
Un album sans fioriture, qui va droit au but pour le bonheur des amateurs de doom les plus exigeants. Une force brutale dans l'écriture des compositions et un groove exceptionnelement maitrisé au menu. Une bonne claque auditive.
-Genre : Doom Metal.
-Maison de disques : Rise Above Records.
-Pour fans de : Black Sabbath, Saint Vitus, Electric Wizard, Sleep, Cathedral, Orange Goblin, Eyehategod, Corrosion Of Conformity...
-Web : http://www.churchofmisery.net/
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